Essai du Huawei Mate 30 Pro : un marché (très) restreint
Plusieurs mois après son lancement ailleurs dans le monde, le Huawei Mate 30 Pro arrive ce vendredi au Canada. Il s’agit d’un excellent téléphone, qui risque toutefois de rejoindre un marché (très) restreint au Canada. Du moins, tant que son prix ne sera pas revu à la baisse. Mise à l’essai.
Mise en contexte
Le Huawei Mate 30 Pro, arrive au Canada à un bien drôle de moment. Alors qu’il a été lancé ailleurs dans le monde en octobre, un peu après la mise au ban de Huawei aux États-Unis, son arrivée ici avait été repoussée à une date ultérieure, probablement dans l’attente d’un règlement entre l’entreprise et le gouvernement de Donald Trump, et/ou en attendant de savoir quel opérateur allait l’offrir au pays.
Six mois plus tard, les problèmes de Huawei aux États-Unis ne sont toujours pas réglés (et les services de Google ne peuvent donc pas être offerts sur ses nouveaux appareils) et aucun opérateur n’a choisi de vendre le téléphone au Canada. Et pour ajouter à la confusion, Huawei a présenté le mois dernier son P40 Pro, son nouveau téléphone phare, qui sera lancé en juin au Canada.
Malgré tout, le Mate 30 Pro sera offert ce vendredi au Canada, chez des détaillants comme Newegg et Bureau en gros.
Design et caractéristiques : joli et performant
Le Huawei Mate 30 Pro un est téléphone assez grand, doté d’un grand écran OLED de 6,53 pouces d’une résolution de 2400 par 1176 pixels. Ce dernier est complètement recourbé à gauche et à droite, ce qui lui donne quand même une jolie allure. À l’arrière, on y retrouve quatre caméras placées dans une rondelle centrale, et une finition lustre, officiellement d’une couleur « gris spatial », mais en pratique beaucoup plus près du lilas que du gris.
Détail intéressant, celui-ci n’offre qu’un seul bouton physique, sur le côté. Pour changer le volume, il faut plutôt taper sur le rebord et glisser son doigt de haut en bas. Je ne suis pas un grand amateur de la manœuvre, mais celle-ci ne me dérange pas pour autant.
Dans l’ensemble, je préfère la finition et la prise en main du P40 Pro, mais le Mate 30 Pro tire quand même très bien son épingle du jeu.
À l’intérieur, on retrouve les caractéristiques auxquelles on pourrait s’attendre pour un téléphone haut de gamme de Huawei. Le téléphone offre une résistance à l’eau IP68, un processeur Kirin 990 (le même que dans le P40 Pro), 8 Go de RAM, une excellente capacité de 256 Go (avec fente pour carte externe), une grande pile de 4500 mAh (l’autonomie du Mate 30 Pro est d’ailleurs excellente, vous n’aurez aucun problème à terminer la journée), la recharge sans fil rapide 27 W et la recharge filaire rapide de 40 W.
L’appareil offre deux cartes SIM, mais ne sera pas compatibles avec les réseaux 5G.
En bref, le téléphone est performant et polyvalent. Il n’offre pas la puissance brute des modèles dotés d’un processeur Snapdragon 865, mais il pourra néanmoins faire fonctionner les jeux les plus lourds pendant plusieurs années.
Appareil photo : dans l’ombre du P40 Pro
Si Huawei avait lancé son Mate 30 Pro l’année dernière comme c’était supposé être le cas, celui-ci aurait probablement été mon appareil photo mobile préféré.
On y retrouve quatre capteurs, soit deux grands capteurs principaux (un optimisé pour les photos, surtout à la noirceur, et l’autre pour les vidéos et les clichés grands angles), un téléobjectif 3X et un capteur pour mesurer la profondeur.
Il prend de bonnes photos à la lumière comme à la noirceur et la prise de photos est peut-être la plus rapide sur le marché (la vitesse pour la prise de portraits et particulièrement ahurissante). Tant du côté matériel (développé en collaboration avec Leica) que logiciel, le Mate 30 Pro offre de superbes appareils photo. La balance des blancs, la luminosité, la profondeur de champ : tout est généralement réussi du premier coup.
Cela dit, Huawei n’a pas lancé son Mate 30 Pro l’année dernière. L’entreprise le lance ce mois-ci, juste avant le P40 Pro, qui prend à mon avis de meilleurs clichés, surtout à la noirceur. Si cela n’enlève rien au Mate 30 Pro, force est quand même de constater que les deux appareils ont le même public cible. Et à moins d’une différence de prix majeure, je ne vois pas pourquoi on choisirait le Mate 30 Pro avant le P40 Pro.
Logiciel : on peut survivre sans Google. Mais veut-on le faire?
Côté logiciel, le Mate 30 Pro est équipé d’Android 10, mais l’appareil n’est pas compatible avec les services Google. Le principal désavantage est donc que vous n’aurez pas accès aux logiciels de Google, ni à la boutique Google Play.
Le problème est certainement un inconvénient, mais ce n’est pas la fin du monde non plus. La boutique AppGallery qui remplace la boutique Google Play offre quand même plusieurs applications, incluant plusieurs québécoises (PewdiePie’s Tuber Simulator, Game of Thrones Beyond the Wall, etc.). On peut aussi installer des boutiques tierces, comme MoreApps (accessible par l’AppGallery) et APKPure, qui offrent toutes les applications de la boutique Google Play.
Vous ne pourrez toujours pas utiliser les applications de Google (vous devrez passer par leur version web si vous y tenez et si elles existent), mais vous pourrez faire rouler n’importe quoi d’autre. Après plus d’un mois avec le Mate 30 Pro, l’absence de Google ne m’a d’ailleurs contrarié qu’une seule fois (quand j’ai voulu jouer à Stadia).
Honnêtement, Huawei a fait un bon travail pour remplacer les services Google sur son appareil. Malheureusement, l’entreprise n’offre toutefois aucun avantage en contrepartie. Oui, on peut apprendre à vivre sans Google, mais Huawei ne nous fournit pas de bonne raison de le faire.
Un téléphone trop cher pour l’instant
Pour nous faire oublier Google et le fait qu’on ne peut pas acheter le Mate 30 Pro chez un opérateur, Huawei avait deux options : créer un téléphone avec un matériel carrément exceptionnel , ou encore offrir le téléphone à un prix assez abordable pour que le compromis qu’on exige des acheteurs vaille la peine.
Malheureusement, ce n’est pas le cas ici. Le téléphone de Huawei est excellent, mais il n’est pas dans une autre classe non plus (par rapport aux Galaxy S20 de Samsung et au OnePlus 8 Pro, par exemple).
Et côté prix, le Mate 30 Pro est carrément cher, à 1399$. C’est certainement le prix qu’il aurait valu l’année dernière avec les services Google, mais ce n’est pas le prix qu’il vaut aujourd’hui, sans Google. Pour faire passer la pilule, Huawei offre quelques cadeaux à son achat, comme une vieille tablette Android MediaPad T3 10 et une garantie prolongée, mais ce n’est pas suffisant.
Si l’entreprise veut vendre des Mate 30 Pro au Canada, elle n’aura pas d’autres choix que de revoir son prix à la baisse, et ce, d’une façon marquée. En attendant, les amateurs les plus mordus de la compagnie préféreront le P40 Pro, et les amateurs d’Android en général préféreront avoir accès à Google s’ils doivent payer 1400$ sans entente pour un téléphone.