Essai du Pixel 5 : Google change de cap
Terminés, les téléphones très haut de gamme pour Google. Avec le lancement du Pixel 5 la semaine dernière, l’entreprise confirme qu’elle ne tente plus de rivaliser avec les Samsung Galaxy S20 et iPhone 12 Pro de ce monde, mais qu’elle essaie plutôt d’offrir une expérience convenable à ses utilisateurs, pour moins cher. Et dans l’ensemble, c’est quand même réussi.
Même si la décision risque de décevoir certains amateurs de la marque, force est de constater que la tangente prise avec le Pixel 5 était rendue inévitable. En effet, même si le système d’exploitation Android se porte mieux que jamais, Google vend peu de téléphones directement. En Amérique du Nord, moins de 3% des téléphones intelligents en circulation seraient des appareils Google. Dans le monde, la firme de recherche IDC estime que les parts de marché de Google n’étaient que de 0,4% en 2019.
Malgré ces parts microscopiques, 2019 était la meilleure année de Google à ce jour comme fabriquant de téléphones. La hausse n’était toutefois pas venue des Pixel 3 et Pixel 4, mais plutôt de l’appareil d’entrée de gamme Pixel 3a. Bref, un changement de stratégie s’imposait pour son appareil phare en 2020.
Design : drôle de finition (mais on s’en fout)
Alors que le Pixel 4 était conçu en aluminium et en verre, le Pixel 5 est plutôt recouvert d’une couche de plastique. On sent tout de suite la différence entre les mains. La construction est solide, mais on dirait que l’on tient un accessoire bon marché. C’est, à mon avis, une façon intelligente de réduire le prix de l’appareil, surtout que vous n’y verrez que du feu si vous protégez le téléphone dans un étui (ce que vous devriez faire, évidemment).
Autre nouveauté, le Pixel 5 est désormais offert en un seul format (il n’y a pas de Pixel 5 XL). Son écran est de 6 pouces, donc entre le format du 4 et du 4 XL. Il est malgré tout un peu plus étroit (et à peine plus long) que le Pixel 4. C’est un format qui me plait bien. Il est d’ailleurs considérablement plus petit que le Pixel 4 XL de l’année dernière, mais l’écran, lui, est presque identique.
L’écran OLED est d’une bonne qualité, avec une résolution tout à fait convenable de 1080 par 2340 pixels et un rafraichissement de 90 Hz. Ce n’est pas du 120 Hz, mais cela rend tout de même la navigation plus fluide (et c’est mieux que ce qu’offre Apple avec ses nouveaux iPhone 12 Pro).
Détail intéressant, l’appareil est doté d’un lecteur d’empreintes digitales à l’arrière, comme on en retrouvait souvent il y a quelques années. C’était sûrement une autre façon d’économiser, mais c’est aussi à mon avis une bonne idée, puisque je ne suis toujours pas satisfait des lecteurs d’empreintes sous l’écran qu’on retrouve de plus en plus souvent dans les appareils Android.
Caractéristiques et performances
Google a aussi choisi de laisser tomber certaines fonctionnalités de son téléphone. On ne peut pas appuyer sur les bords de l’appareil avec la paume de sa main pour lancer l’Assistant comme on pouvait le faire avec les anciens Pixel, et le téléphone n’est pas doté du radar Soli, comme l’était le Pixel 4. Je crois que personne ne va pleurer ces deux fonctionnalités, qui étaient probablement utilisées par 3 personnes chez Google en tout.
Google a aussi laissé tomber Face Unlock, une technologie de reconnaissance faciale qui nécessitait un gros cadre au-dessus de l’écran du Pixel 4. Je regrette la perte de fonctionnalité, mais considérant que le lecteur d’empreintes digitales est de retour, je suis prêt à m’en passer (surtout si le téléphone est un peu plus court et un peu moins cher).
Parmi les gains (car il y en a quelques-uns), notons que l’appareil offre désormais 8 Go de mémoire vive et une capacité de 128 Go (plutôt que 64 Go auparavant pour le modèle d’entrée de gamme).
Surtout, la pile de 4080 mAh du Pixel 5 est aussi considérablement plus grande que celle de 2800 mAh du Pixel 4. L’autonomie était d’ailleurs le talon d’Achille de ce dernier. Alors que le Pixel 4 devait être rechargé avant la soirée si on voulait traverser une longue journée, le Pixel 5 n’a nullement ce problème. Sa recharge rapide de 18W est plus lente que la moyenne des appareils haut de gamme en 2020, mais ce n’est pas très grave non plus.
Bref, jusqu’ici, tout va bien.
Malheureusement, toutes les coupures ne passent pas aussi bien. Google a en effet choisi d’équiper son téléphone d’un processeur Snapdragon 765G, et non d’un Snapdragon 865 comme on retrouve dans les téléphones Android haut de gamme.
Pour un œil averti, ça se sent. Le téléphone est par exemple un petit peu plus lent à déverrouiller que les autres, et il faut attendre quelques secondes lorsque l’on prend une photographie en mode portrait pour voir le résultat final. Les portraits en rafale sont aussi difficiles à effectuer, et certaines retouches de l’éditeur photos (pour changer l’éclairage des portraits, par exemple) demandent un peu de patience. Dans les tests de type Benchmark, celui-ci est d’ailleurs moins puissant que les téléphones lancés il y a deux ans avec la puce Snapdragon 845.
On peut faire fonctionner toutes les applications sur le marché, et quelqu’un qui n’a pas l’habitude d’un téléphone de l’année ne remarquera probablement pas la différence. Mais il s’agit néanmoins d’un compromis qui se fait sentir. Et, surtout, c’est un compromis qui rend l’appareil moins intéressant par rapport à d’autres modèles sur le marché (nous y reviendrons).
Appareil photo : petites avancées
L’appareil photo est généralement l’une des forces des téléphones Pixel, et c’est encore un peu le cas cette année.
Ici, l’économie n’a pas été réalisée en coupant des fonctionnalités, mais plutôt en gardant les mêmes : la caméra principale (12 mégapixels, F1.7, 1/2.55″) du Pixel 5 est en effet la même que celle du Pixel 4. Celle-ci est d’une bonne qualité, surtout grâce à son logiciel qui permet de prendre des portraits particulièrement réussis. L’appareil prend aussi de jolis clichés à la noirceur, encore une fois, mais les autres fabricants se sont aussi améliorés de ce côté. L’avantage de Google n’est plus vraiment présent.
Le téléobjectif a quant à lui été remplacé par un objectif grand angle correct, avec une ouverture F2.2. Je préfère personnellement un grand angle à un téléobjectif, mais c’est une question de goût.
Vous ne prendrez pas forcément les meilleures photos sur le marché avec le Pixel 5, mais celles-ci seront quand même excellentes. C’est, pour moi, un compromis acceptable pour un téléphone vendu moins cher que les autres.
Logiciel : la grosse force
S’il y a un point où le Pixel 5 offre une expérience sans compromis, c’est par rapport à son logiciel.
Avec un Pixel, vous avez droit aux mises à jour Android rapidement et pendant plus longtemps qu’avec les autres fabricants (à l’exception d’Apple), mais vous avez aussi droit aux « feature drop », des fonctionnalités que Google lance sur ses appareils en premier.
Le nouvel outil pour retoucher l’éclairage dans les portraits du Pixel 5 est un exemple de ces fonctionnalités uniques, mais il y en a d’autres. La transcription automatique de l’enregistreurs, avait notamment aussi été offerte en « feature drop ».
Le Pixel 5 est aussi doté d’un nouveau mode de prolongement extrême de la batterie, où presque toutes les fonctionnalités sont coupées. Une fonction intéressante en camping, par exemple, pour garder sa ligne ouverte pour les urgences lors d’un voyage d’une fin de semaine.
Un bon téléphone, mais pour qui?
J’aime les téléphones moins chers, alors j’aime bien le Pixel 5.
Malheureusement, je ne suis pas convaincu que celui-ci permettra à Google de renverser la vapeur. À 800$ sans entente, il n’est après tout pas SI abordable que ça. Il est certainement moins cher qu’un Samsung Galaxy S20, par exemple. Mais il n’est que 150$ de moins que l’excellent Galaxy S20 FE 5G, un appareil similaire, qui fait toutefois moins de compromis (par rapport au processeur, notamment). Si vous aimez la techno, le choix entre les deux ne sera pas évident (et on pourrait aussi ajouter l’iPhone 12 Mini à cette réflexion).
Mais c’est surtout avec une entente que le bât blesse. Chez les opérateurs canadiens, le Pixel 5 est en effet plus cher que plusieurs modèles haut de gamme de l’année dernière, comme le Samsung Galaxy S10. Ce dernier sera mis à jour moins longtemps, mais il s’agit à plusieurs égards d’un meilleur appareil.
Et pour ceux qui veulent un bon téléphone tout en payant le moins cher possible, je pense que le Pixel 4a, qui n’impose que quelques compromis de plus que le Pixel 5, représente une meilleure aubaine, à 479$ sans entente.
Bref, le Pixel 5 est un bon téléphone. Ceux qui l’achètent vont l’adorer. Mais je ne suis pas convaincu que ce soit celui dont Google avait besoin en ce moment.