Un mot sur le CRTC et les services de gros
Le CRTC a rendu hier sa décision concernant les l’itinérance de gros pour les grandes compagnies cellulaires canadiennes. Si la décision de l’organisme gouvernemental est forcément un pas dans la bonne direction, qui pourrait avoir un certain impact sur la concurrence au Canada, je doute qu’elle puisse renverser la vapeur à elle-seule et finalement insuffler un peu plus de concurrence dans le marché canadien.
Pour ceux que ça intéresse, je parlais plus longuement de la décision hier sur mon blogue dans le Journal Metro.
En gros, le CRTC imposera désormais un prix plafond que pourront charger Bell, Rogers et Telus aux plus petits opérateurs, comme Wind et Vidéotron, lorsque leurs utilisateurs utilisent leur réseau.
Pour bien comprendre la décision et la situation actuelle, il faut analyser Wind Mobile dans le reste du Canada. Un utilisateur de Wind Mobile peut se doter d’un forfait extrêmement abordable, mais peut en profiter seulement lorsqu’il est sur le territoire précis de Wind. Un territoire limité à quelques villes seulement. Lorsqu’il sort du réseau de Wind, l’utilisateur passe chez un réseau partenaire, et doit alors payer des frais d’itinérance, comme s’il était à l’étranger. Ces frais sont plus abordables qu’auparavant grâce à l’implication du gouvernement l’année dernière, mais ils sont encore dispendieux. Notons que contrairement aux abonnés de Wind, ceux de Vidéotron ne doivent pas payer pour ces frais d’itinérance.
La stratégie du CRTC
La stratégie du CRTC avec sa décision d’hier est simple: forcer les grands opérateurs à diminuer leurs frais d’itinérance de gros, ce qui permettra aux petits opérateurs d’économiser et de transférer l’économie à leurs utilisateurs. Ceci devrait permettre aux petits opérateurs de mieux performer, mais aussi forcer les grands opérateurs à ajuster leurs propres forfaits à leur tour. Bref, augmenter la concurrence qui fait cruellement défaut au Canada.
Il s’agit d’un plan qui devrait avoir un certain impact, et c’est pour cette raison que j’affirmais hier que la décision du CRTC était une bonne nouvelle pour les consommateurs.
Une économie qui n’a pas été chiffrée
Maintenant, une bonne nouvelle ne veut pas forcément dire la meilleure des nouvelles.
Car le prix de l’itinérance en gros n’a pas été chiffré par le CRTC, puisque ce sont Bell, Rogers et Telus qui doivent proposer un prix d’ici le 4 novembre prochain, en fonction de combien le service de gros leur coûte réellement.
Si on se fie à ce qui s’était passé lors de la création du Code sur les services sans fil du CRTC, on peut s’attendre à une certaine avancée, mais dans une optique de compromis. C’est pour cette raison par exemple que les opérateurs vous chargent parfois 50$ pour déverrouiller un téléphone, alors que la logique voudrait plutôt un frais nul, ou du moins bien inférieur, surtout que cette clause avait été imposée par le CRTC pour faciliter le transfert des abonnés d’un opérateur à l’autre.
On peut aussi se demander quel pourcentage des économies réalisées par les petits opérateurs sera réellement transférée au public.
Notons au passage que le CRTC a aussi choisi de ne pas forcer les opérateurs à vendre leurs services aux réseaux 100% virtuels MVNO, ce qui aurait probablement eu un impact beaucoup plus grand sur les prix des forfaits que tout ce qu’on a vu jusqu’ici.
Vouloir plus de concurrence, sans rien chambouler
Le CRTC veut améliorer depuis plusieurs années la concurrence dans l’industrie mobile canadienne, mais sans faire de mal à personne, et sans nuire aux investissements dans les réseaux. C’est une tâche complexe et délicate, avec laquelle, il faut être franc, le CRTC n’a pas connu le succès espéré jusqu’ici (c’est après tout pour cette raison que le CRTC a dû intervenir encore une fois hier).
La décision d’hier sur l’itinérance en gros est une bonne décision, et un pas dans la bonne direction, mais à moins d’une surprise majeure lorsque l’organisme imposera les nouveaux tarifs, j’ai peur que ce pas soit, encore une fois, trop petit pour avoir un réel impact sur la concurrence dans l’industrie au Canada.
Si ça ne fonctionne pas, l’organisme devra peut-être commencer à regarder des solutions un peu plus drastiques pour faire bouger les choses.
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