Observsations sur Uber à San Francisco
L’application mobile pour réserver et payer un taxi Uber fait beaucoup de bruit, et ce, partout dans le monde. La Presse dresse d’ailleurs ce matin un excellent portrait de la situation à Montréal. Pour vous aider à vous faire votre propre idée sur la compagnie, voici quelques observations sur Uber à San Francisco, où le service n’a rien à voir avec celui que l’on connait ici.
En effet, même s’il s’agit de la même application mobile, Uber à San Francisco est en effet complètement différent d’Uber à Montréal.
À Montréal, Uber permet aux chauffeurs de taxi de prendre de nouveaux clients via une application iOS et Android, qui met en contact un utilisateur doté d’un téléphone intelligent et un chauffeur à proximité. Après la course, Uber se charge de payer le chauffeur avec la carte de crédit de l’utilisateur enregistrée dans ses serveurs. Aucun échange d’argent n’est donc nécessaire. Uber garde 15% du montant affiché sur l’horodateur, et un pourboire (généralement de 10%) est ajouté automatiquement au montant.
À San Francisco, un service similaire est également offert, où Uber permet de relier un utilisateur avec un taxi traditionnel, mais il ne s’agit que d’une petite portion de l’application.
Uber y permet en effet surtout de mettre en contact des utilisateurs avec des chauffeurs privés. Des gens, comme vous et moi, qui prennent leur voiture pour quelques heures et qui s’improvisent chauffeur de taxi à l’occasion (il y a toutefois un processus à suivre pour se faire accepter).
Le service est décliné en plusieurs formes selon les villes, puisqu’il est possible de louer des voitures régulières, Uber X, mais aussi des limousines, ou encore des berlines haut de gamme, qui sont alors plus dispendieuses.
Dans tous les cas, comme à Montréal, les courses se font sans aucun transfert d’argent, ce qui rend la chose beaucoup plus rapide et agréable. Les utilisateurs donnent aussi une note au chauffeur par la suite, ce qui permet aux prochaines personnes d’éviter les chauffeurs les moins bien cotés.
J’ai eu l’occasion d’essayer Uber X à plusieurs reprises au cours des derniers mois lors des différentes conférences technos auxquelles j’ai assisté à San Francisco. Voici quelques observations amassées avec le temps.
Premier avantage: le prix
Prendre une voiture Uber X plutôt qu’un taxi à San Francisco a un avantage majeur pour l’utilisateur : le prix.
À San Francisco, une voiture Uber X coûte 4$ de base, 0,30$ par minute d’attente et 1,50$ par mile parcouru. Un taxi coûte plutôt 3,50$ de base, 0,55$ par minute d’attente et 2,75$ par mile parcouru.
La différence peut sembler minime, mais elle devient rapidement importante. 7$ pour une petite course qui me coûtait auparavant 11$, 37$ pour une course à l’aéroport qui coûte 50$ en taxi, etc.
Pour l’utilisateur, Uber X est franchement plus avantageux que le taxi à San Francisco. Évidemment, ce n’est certainement pas le cas pour les compagnies de taxis, et les prix ne sont pas les mêmes d’une ville à l’autre, cet avantage ne sera donc pas toujours aussi important.
Propreté étincelante
Toutes les voitures Uber X dans lesquelles j’ai embarqué étaient d’une propreté étincelante. Ceci étant dit, c’est généralement également le cas dans les taxis de San Francisco.
À Montréal? Il n’est pas rare de tomber sur des voitures aux sièges tachés et à la propreté douteuse. Ce n’est pas toujours le cas, évidemment, mais la différence est assez importante pour qu’elle soit instantanément remarquable lorsque l’on embarque dans une Uber X.
Chauffeurs : des bons et des mauvais
Je suis tombé sur toute une gamme de chauffeurs Uber à San Francisco. Dans la très grande majorité des cas, le service était impeccable, avec même parfois des petites bouteilles d’eau gratuites à l’arrière pour les utilisateurs.
J’ai aussi eu une mauvaise expérience par contre, avec un chauffeur vraisemblablement nouveau dans la ville, qui possédait une bien mauvaise connaissance de ses rues et de ses quartiers.
Détail intéressant, certains chauffeurs avec lesquels je me suis entretenu étaient d’anciens chauffeurs de taxis qui ont laissé tomber leur travail pour conduire à temps plein avec Uber, qu’ils jugeaient plus payant.
Notons que dans tous les cas, Uber fait une certaine enquête pour vérifier les antécédents de ses chauffeurs, et que les utilisateurs peuvent noter ces derniers, ce qui devrait assurer une certaine qualité (aucune vérification n’est parfaite par contre, cela va sans dire).
Un problème majeur : les hausses de prix subites
Pour les utilisateurs, il y a un problème majeur avec le modèle d’affaires d’Uber dans les autres villes que Montréal où le service est offert : les hausses de prix subites (price surge).
En gros, lorsque la demande est très forte, Uber monte ses prix, parfois drastiquement (le plus haut que j’ai observé était 2,5X, mais on parle parfois de hausses de 6X et 8X par rapport au prix habituel), ce qui a pour effet d’encourager plus de chauffeurs à prendre la route et, évidemment, de permettre à la compagnie de faire plus de profits.
Les hausses de prix découragent aussi souvent les utilisateurs, qui privilégieront alors la marche, le transport en commun ou un taxi traditionnel.
Un utilisateur éméché qui décide de laisser sa voiture en ville pour retourner à sa maison et qui s’aperçoit que sa course lui coûtera plus de 100$ risque-t-il de prendre la route à la place? Peut-être. Et dans une ville sans taxis réguliers (comme San Francisco pourrait bien le devenir), qu’adviendra-t-il d’une personne pauvre qui doit se rendre à l’hôpital en pleine tempête, par exemple?
Une industrie qui a besoin d’être bousculée, sans pour autant être complètement dérèglementée
Je n’ai pas l’intention de m’embarquer aujourd’hui sur les bienfaits ou les méfaits d’Uber à long terme. Je vais laisser ce privilège à ceux qui possèdent une meilleure connaissance de cette industrie.
Une chose m’apparaît toutefois évidente: l’industrie du taxi a actuellement de nombreux problèmes, et certains changements pourraient être bénéfiques pour tout le monde.
Il n’est pas normal qu’un chauffeur ait besoin de conduire 12 heures par jour, six jours par semaine, pour obtenir un tout petit salaire à la fin de la semaine.
En même temps, il n’est pas non plus normal que des voitures soient des fois infectes, ou qu’il faille parfois être vigilant pour être certain que l’on passe par le chemin le plus optimal en taxi.
L’arrivée d’Uber – non pas dans sa forme montréalaise actuelle, mais dans sa forme habituelle, comme à San Francisco, où n’importe qui peut prendre sa voiture pour faire le taxi – risque de faire mal à plusieurs personnes, tout particulièrement aux propriétaires de permis de taxis et aux centrales, mais aussi à certains chauffeurs, à cause d’une augmentation de l’offre.
Ceci ne veut toutefois pas dire qu’il faille complètement abandonner l’idée et bloquer l’arrivée d’Uber.
L’arrivée des voitures Uber X devrait toutefois se faire d’une manière encadrée et non déréglementée afin de protéger les chauffeurs, les propriétaires de permis et les utilisateurs moins fortunés, mais aussi de permettre aux utilisateurs de profiter d’un service qui est bien souvent meilleur que celui qui est présentement offert à Montréal.
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