Rétrospective techno 2011: les 31 plus grandes nouvelles
4: Google se paie Motorola
Probablement la plus grande surprise techno de l’année, Google a annoncé le 15 août dernier le rachat de Motorola Mobility. Un rachat qui met Google dans une drôle de position, en concurrence directe avec ses partenaires comme Samsung et HTC, mais qui lui permet aussi (on l’espère) de les protéger des nombreuses poursuites légales qui s’accumulent contre Android grâce aux 17 000 brevets de Motorola Mobility.
Voici ce que j’avais à dire lors de cette acquisition :
Google a annoncé ce matin son intention de racheter le fabricant américain de tablettes et de téléphones cellulaires Motorola Mobility. Grace à cette acquisition, la compagnie pourra avoir un contrôle direct sur le côté matériel des téléphones et tablettes Android, et, peut-être surtout, Google met la main sur un important portfolio de brevets, qui pourrait lui permettre de mieux affronter la crise des poursuites qui secoue Android depuis quelques mois.
Malgré la transaction, le système d’exploitation Android devrait demeurer ouvert et accessible aux autres manufacturiers, selon ce qu’a assuré la compagnie.
Plus tôt cette année, Motorola s’était séparée en deux compagnies distinctes, Motorola Mobility (les téléphones, tablettes, etc.) et l’équipementier Motorola Solutions. La transaction serait estimée à 12,5 milliards $ US, soit 40$ par action, et elle pourrait être finalisée vers la fin 2011 ou au début 2012.
Rappelons que Motorola Mobility a essuyé des pertes de 56 millions $ US au second trimestre de 2011, tandis que Google avait dans ses coffres, avant la transaction, plus de 39,1 milliards $ US.
Notons aussi que Motorola Mobility posséderait environ 3 milliards $ en banque, ce qui diminue plutôt à environ 9,5 milliards $ la valeur réelle de la transaction, un montant qui se rapproche des 8 milliards payés par Microsoft pour mettre la main sur Skype il y a quelques mois.
Les précieux brevets
Dans un billet incendiaire, Google avait expliqué au début du mois comment Microsoft, Oracle, Apple et d’autres compagnies menaient une campagne hostile et organisée contre Android à l’aide de poursuites-bidons contre Android.
Que l’on accepte ou non la version des faits de Google, il semble que la compagnie de Mountain View, elle, y croit bien. Selon le PDG de Google Larry Page, l’acquisition de Motorola pourrait «améliorer le portfolio de brevets de Google, ce qui nous permettra de mieux protéger Android des menaces anti-compétitives de Microsoft, Apple et d’autres compagnies».
Motorola Mobility possède plus de 17 000 brevets, en plus de 7 500 en attente dans le monde, ce qui devrait fournir bien des munitions à Google et à ses partenaires.
D’ailleurs, le prix de vente élevé de Motorola Mobility s’explique probablement en grande partie par ces brevets. Rappelons que les 6000 brevets de la compagnie canadienne Nortel ont récemment été vendus pour 4,5 milliards $ US à un consortium d’entreprises incluant Apple, EMC, Ericsson, Microsoft, RIM et Sony.
Accélérer l’innovation?
Selon Google, la transaction devrait permettre d’accélérer l’innovation dans la mobilité. Si la compagnie se décide en effet à accélérer l’évolution des nouveaux téléphones (ce qu’elle avait fait lors du lancement du premier Nexus One au début 2010, un appareil dont les caractéristiques étaient franchement supérieures à celles des autres appareils sur le marché), il est vrai que l’impact de la transaction pourrait se faire ressentir sur l’ensemble de l’écosystème Android.
Dans les faits, Motorola devrait toutefois être géré comme une entreprise indépendante, et j’ai un peu de misère à croire qu’elle ralentissait jusqu’ici volontairement le rythme de ses innovations. L’impact annoncé par Larry Page demande donc à être démontré.
Quel impact pour les partenaires?
Même si Google a promis de garder intacte l’ouverture du système d’exploitation Android, force est d’admettre toutefois que la décision risque d’avoir l’effet d’une douche froide tiède sur les autres partenaires Android, comme LG et HTC.
Selon le cofondateur d’Android Andy Rubin, le programme Nexus actuel, où Google accorde une courte période d’exclusivité à un partenaire au lancement d’une nouvelle version d’Android, devrait être maintenu en place. Il s’agit d’une excellente nouvelle, mais il sera difficile de ne pas voir de traitement de faveur lorsque que Motorola aura droit à son exclusivité.
Mais même si la compagnie continue d’attribuer les premiers appareils à tous les manufacturiers de la même façon qu’à l’heure actuelle, le simple fait de connaître d’avance ce qui s’en vient avec le système d’exploitation pourrait également conférer un avantage certain à Motorola.
Je ne crois pas que les HTC de ce monde vont abandonner Android. D’ailleurs, HTC, Samsung, LG et Sony Ericsson ont tous exprimé par communiqué leur soutien à l’acquisition.
Mais une chose est certaine, mettre tous ses œufs dans le panier Android (ce que font présentement Sony Ericsson et plusieurs autres) est soudainement devenu une stratégie à long terme bien moins intéressante pour les partenaires de Google.
3: Nokia choisit Windows Phone
Le plus grand fabricant de téléphones cellulaires au monde a choisi en début d’année de complètement réorienter sa stratégie future par rapport aux téléphones intelligents : au lieu de continuer à développer MeeGo, considéré jusqu’ici comme son système d’avenir, Nokia mise désormais tous ses jetons dans le système Windows Phone de Microsoft.
Par le fait même, Nokia relègue aussi sa vieillissante plateforme Symbian aux marchés en développement, où la compagnie domine toujours le marché grâce à ses téléphones mobiles solides et abordables.
Considérant le fait que MeeGo est encore une plateforme en développement, il s’agissait probablement de la bonne décision.
Windows Phone est un bon système d’exploitation, prometteur, et sa boutique de 40 000 applications, bien que loin derrière iOS et Android, est quand même la troisième en importance.
Pour l’instant, Windows Phone est un joueur mineur dans le monde des téléphones intelligents, mais cette alliance avec le plus important fabricant au monde pourrait bien changer les choses.
Est-ce que Windows Phone pourra dépasser iOS et Android? J’en doute. Du moins, pas à court terme. Le système d’exploitation de Microsoft pourrait toutefois, en partie grâce à cette alliance, s’établir comme troisième joueur solide, ce qui était loin d’être acquis en janvier dernier.
Voici ma présentation vidéo du Nokia Lumia 800, l’un des premiers téléphones Windows Phone de Nokia qui sera lancé au Canada au début 2012.
2: LulzSec et la sécurité à heure de grande écoute
J’accorde la seconde position de cette rétrospective techno de 2011 à la sécurité électronique dans son ensemble. S’il y en avait encore pour douter de l’importance du piratage, de l’espionnage et du vol de données l’année dernière, 2011 les aura surement fait changer leur fusil d’épaule.
La liste des nouvelles concernant la sécurité informatique cette année est longue et extrêmement variée.
On n’a qu’à penser à l’explosion du groupe Lulzsec, à la participation d’Anonymous dans différents dossiers reliés notamment à WikiLeaks, mais aussi à la probable participation des États-Unis dans la conception du virus Stuxnet, qui pourrait avoir été développé pour affaiblir le programme nucléaire iranien, et les nombreuses attaques supposées du gouvernement chinois sur certains pays (dont le Canada).
Dans un autre genre, le scandale des écoutes électroniques des tabloïdes comme News of the World continue pour sa part de faire parler jour après jour en Angleterre.
L’ère des pirates?
Si l’espionnage entre les pays ou des tabloïdes sont des cas à part, la forte place qu’ont occupée les groupes comme Anonymous et LulzSec dans les médias cette année est particulièrement intéressante. S’agit-il d’une nouvelle tendance pour 2011, ou simplement d’une surreprésentation parmi tant d’autres?
Peut-être un peu des deux. Pour David Marcus de McAfee, que j’ai interviewé pour mon article sur les mots de passe dans le magazine Jobboom en octobre dernier, ce genre d’attaques existe depuis plusieurs années, mais leur fréquence semble avoir augmenté récemment. «Une chose est certaine, elles sont surtout de plus en plus publicisées», estime le directeur à la recherche en sécurité.
Du bon malgré tout
Même si certains cas de piratage rapportés ces derniers mois sont tout à fait sérieux – Sony pourrait s’être par exemple fait voler en avril dernier 2,2 millions de numéros de carte de crédit emmagasinés sur sa plateforme de jeux PlayStation Network – le président de Gardien Virtuel Patrick Boucher – que j’ai également interrogé pour le même article – estime que la récente vague médiatique pourrait avoir du bon dans le monde de la sécurité informatique.
«Ça sensibilise les entreprises à l’importance de la sécurité, estime-t-il. Les compagnies disent que oui, elles sont protégées, mais dans les faits, ce n’est généralement pas le cas».
Surtout que, comme le note David Marcus, «les pirates sont devenus assez bons pour trouver les failles dans la sécurité des entreprises et les exploiter».
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