Les jeux politiques derrière les mises à jour d’Android
Même si le passage des Samsung Galaxy S vers Android 2.2 Froyo ne s’est pas fait sans embûches au Canada, la situation est encore plus corsée aux États-Unis, où les populaires téléphones de Samsung roulent toujours sous Android 2.1 Eclair.
Que s’y passe-t-il? Il semblerait que Samsung soit un peu trop gourmand au goût des opérateurs américains, et que ceux-ci auraient décidé de forcer la main du géant coréen en ne mettant pas leurs téléphones à jour, selon ce qu’a publié une personne bien informée sur le forum XDA-Developers.
Son explication, en plus de clarifier la situation actuelle avec les Samsung Galaxy S, lève également le voile sur le fonctionnement général des mises à jour entre les manufacturiers et les opérateurs.
Voici ma traduction (très) libre de son message:
Bonjour,
Je vais faire fi des ententes de confidentialité et expliquer les problèmes derrière la mise à jour vers Froyo des téléphones Samsung Galaxy S aux États-Unis. Je crois que vous l’avez tous compris maintenant : l’absence de mise à jour est causée par des motifs politiques, et non technologiques, puisque Froyo roule très bien sur les téléphones Galaxy S, comme certains d’entre vous l’ont déjà remarqué.
Avant d’expliquer le conflit politique, je dois tout d’abord expliquer comment les mises à jour fonctionnent pour les opérateurs. Lorsqu’un opérateur décide de vendre un téléphone, un contrat est signé entre le manufacturier et l’opérateur. Dans ce contrat, on indique notamment le coût que doit payer l’opérateur pour les mises à jour. Ces mises à jour (MAJ) sont généralement divisées en plusieurs catégories : MAJ critiques, MAJ de maintenance, MAJ de fonctionnalités.
Les MAJ critiques sont celles qui touchent les bogues critiques, comme un téléphone qui surchauffe. Les MAJ de maintenance concernent les mises à jour de routine, pour corriger certains bogues notés par l’opérateur. Finalement, les MAJ de fonctionnalités ajoutent des fonctions qui n’étaient pas présentes dans le téléphone au début. Les MAJ critiques sont généralement gratuites, les MAJ de maintenance sont abordables et les MAJ de fonctionnalités beaucoup plus coûteuses.
Par le passé, la plupart des MAJ étaient des MAJ critiques et de maintenance. Les opérateurs ne voulaient à peu près jamais ajouter les MAJ de fonctionnalités, puisqu’elles leur rapportaient peu, elles ajoutaient peu à l’appareil et obligeaient l’opérateur à faire beaucoup de tests de son côté.
Android a toutefois complètement changé la donne. Puisqu’Android est constamment mis à jour, et que cette information est accessible au public, il y a une pression des consommateurs pour que les téléphones soient mis à jour.
Avec la plupart des manufacturiers, comme HTC et Motorola, les MAJ d’Android sont considérées comme des MAJ de maintenance, il n’y a donc pas de problème. Samsung, par contre, considère une MAJ d’Android comme une MAJ de fonctionnalités, et ils exigent d’être payés un prix par appareil vendu pour chaque MAJ d’Android.
Maintenant, voici l’aspect politique : la plupart des opérateurs ne sont pas contents de la décision de Samsung de charger les MAJ d’Android au même prix que des MAJ de fonctionnalités, surtout qu’ils chargent essentiellement pour le travail effectué par l’Android open Source Project, alors que le travail de Samsung dans ces mises à jour est plutôt minimal.
Résultat : après (peut-être) un peu de collusion corporative, tous les opérateurs américains ont décidé de ne pas payer pour la mise à jour vers Android 2.2, en espérant que la dévaluation de la gamme Galaxy S force la main de Samsung et l’oblige à donner gratuitement la MAJ aux opérateurs. Cette situation s’est produite différemment ailleurs dans le monde, mais c’est le cas aux États-Unis.
Vous aurez peut-être marqué que le Fascinate de Verizon a eu droit à une mise à jour, mais pas vers 2.2 : ceci est le résultat d’une entente de maintenance que Samsung a dû honorer, combiné avec la volonté de Verizon de ne pas payer pour la MAJ.
En termes clair, Android 2.2 est sur attente pour tous les téléphones Galaxy S aux États-Unis, et ce, jusqu’à ce que les opérateurs et Samsung parviennent à s’entendre.
Certains se demandent peut-être pourquoi je n’ai pas publié ceci par des voies plus officielles. La réponse courte: je ne veux pas perdre mon travail. J’apprécie la transparence par contre, c’est pour ça que je suis ici.
Il faut évidemment toujours prendre les explications anonymes avec un grain de sel, mais celle-ci me semble plutôt bien informée.
Rien n’indique toutefois que la situation est la même au Canada qu’aux États-Unis. D’ailleurs, les téléphones Galaxy S ont eu droit à une mise à jour au Canada, et rien n’indique que Samsung Canada considérait les MAJ d’Android comme des MAJ de fonctionnalités.
La situation illustre toutefois très bien ce que j’ai expliqué à plusieurs reprises, c’est-à-dire que les mises à jour comme on les connaît désormais est un concept nouveau, et plus coûteux que prévu pour les opérateurs, qui doivent également apprendre à composer avec une pression de plus en plus grande des consommateurs pour que leur téléphone soit toujours à jour.
Et comme les ces derniers lancent de nouveaux téléphones tous les trimestres, la quantité d’appareils à mettre à jour augmente mois après mois.
Je prévois beaucoup d’autres conflits et déceptions pendant les prochains mois, car les téléphones sont présentement vendus sans aucune garantie de mise à jour. Pourtant, les utilisateurs estiment quand même (avec raison) y avoir droit.
La téléphonie mobile a beaucoup évolué au cours des derniers mois, en grande partie grâce à Android et iOS.
Le marché devra s’y habituer et définir (rapidement) de nouvelles règles en conséquence.
Des mises à jour garanties (tant qu’elles sont disponibles) tout au long de l’entente liant l’usager et l’opérateur me sembleraient la moindre des choses.
Source: XDA Developers
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